Après discussion avec une chercheuse spécialiste de la biologie reproductive canine, j'ai pu avoir des éclaircissements dans ce domaine dont je tiens à vous faire part :
- Tout d'abord, la maturation in vitro d'ovocytes récoltés in vivo ne marche désespérément pas et la folliculogenèse in vitro (transformation de cellules germinales haploïdes en gamètes matures) encore moins. La méthode en trois étapes que j'avais imaginé (récolte de cellules souches dans un cheveu, transformation en cellules germinales haploïdes, maturation en gamètes) n'est donc pas applicable pour le chien et il faudra revenir à des protocoles plus conventionnels.
- En revanche, les protocoles d'induction de l'ovulation chez la chienne (agonsites du GnRh sous forme d'implant) ont eux notablement progressé. Même si le contrôle n'est pas parfait, on peut induire l'ovulation dans un fenêtre temporelle pas trop variable et donc faire plus facilement la récolte d'ovules ou le transfert d'embryons.
- Une équipe coréenne a réussi en 2009 à créer une lignée de chiens transgéniques exprimant une protéine fluorescente rouge (RFP) via une combinaison de transgenèse et de clonage [1]. Le principe est de rendre une lignée cellulaire transgénique en insérant le gène d'intérêt dans leur génome, puis de transférer le noyau de ces cellules modifiées dans des ovules dont on a retiré le noyau. Et voilà le résultat :

Dans le cas du projet qui nous concerne, la phase de transgenèse-clonage serait ensuite suivie d'une étape de croisement classique couplée à des tests cognitifs, afin de stabiliser la lignée et de faire ressortir les traits souhaités.
Par ailleurs, j'ai trouvé des voies prometteuses pour humaniser des chiens au-delà de la cognition et de la parole. Pour rappel, les gènes impliqués dans le protocole d'humanisation sont :
- Lhx2, qui agit durant l'embryogenèse sur le développement et l'organisation du cortex cérébral. [2]
- FOXp2, qui régule directement ou indirectement de nombreuses zones du cerveau et du larynx impliqués dans le langage.
Mais on pourrait également remplacer par leur équivalent humain des enhancers (séquences d'ADN qui ne codent pas pour une protéine mais servent à réguler l'activité d'autres gènes) avec notamment :
Voilà de quoi obtenir potentiellement à moyen terme des animaux avec 1) un gros cerveau 2) un cortex proto-humain 3) des organes de la parole fonctionnels 4) un pouce opposable et une stature plantigrade...
D'un autre coté, je suis bien conscient que la faisabilité technique ne fait pas tout et que de nombreuses années de R&D seraient nécessaires pour faire aboutir un tel projet. Sans compter les sérieux obstacles éthiques et sociétaux présents dans ce domaine : au Royaume-Uni, les recherches sur les chimères humain-animal à but médical sont approuvés à seulement 48% pour contre 31% d'opposition, la modification du cerveau et des organes externes étant généralement considérée comme hors-limites [5]...
[1] "Generation of red fluorescent protein transgenic dogs." Hong SG et al., Genesis 47 (5) pp. 314-22 (2009)
[2] “Lhx2 Selector Activity Specifies Cortical Identity and Suppresses Hippocampal Organizer Fate”, Science 319 (5861) pp. 304-309 (2008)
[3] "Human-specific loss of regulatory DNA and the evolution of human-specific traits", McLean, Reno, Pollen et al. Nature (2011)
[4] "Human-Specific Gain of Function in a Developmental Enhancer", Shyam Prabhakar et al. Science 5 321 (5894) pp. 1346-1350 (2008)
[5] "Exploring the Boundaries : Report on a public dialogue into Animals Containing Human Material"
Ipsos MORI, pp. 7-8, September 2010
"Writing is perhaps the greatest of human inventions, binding together people who never knew each other, citizens of distant epochs. Books break the shackles of time. A book is proof that humans are capable of working magic." (Carl Sagan)